Retour des campagnols dans le Jura & Jura bernois

Il vaut économiquement la peine de favoriser les prédateurs en mettant des nichoirs sur vos granges et perchoirs dans vos champs ! Ces rapaces travaillent gratuitement du matin au soir… Et les rapaces nocturnes prennent le relai. Un couple de crécerelles consommera 2'000 campagnols par an !

Le point sur les campagnols dans le Jura & Jura bernois (Yann-David Varennes, Production végétale & Environnement, FRI)

Est-ce une année à campagnols ?  En 2020, nous sommes clairement dans un pic de pullulation sur les Franches-Montagnes, dans la droite ligne de la pullulation qui a été vécue sur Neuchâtel en 2019. Les secteurs de l’Ouest des Franches-Montagnes et l’Ouest du Jura bernois seront donc plus touchés. La chance que nous avons en 2020 est d’avoir eu de longues périodes sans neige, qui ont permis aux prédateurs de faire leur travail ; nous allons sûrement avoir un pic plus bas que le triste record, en durée comme en dégâts, du printemps 2012 à l’automne 2013. Certains agriculteurs avaient alors dû ressemer 2 années de suite leurs prairies.

Que puis-je faire au quotidien pour anticiper un pic sur mes parcelles ? Il vaut vraiment la peine de favoriser les prédateurs en mettant des nichoirs sur vos granges et perchoirs dans vos champs ! Ces rapaces travaillent gratuitement de 6h du matin à 22h du soir… Et les rapaces nocturnes prennent le relai. Fixes ou mobiles, de 2,5 à 4 m de hauteur, les perchoirs permettent à nos rapaces de chasser efficacement (un couple de crécerelles consommera 2'000 campagnols par an). La barre pour les pattes de l’oiseau doit être en bois, et sans angles saillants. On peut également favoriser les hermines avec des tas de pierres, à condition d’avoir des trous de 4 cm entre les pierres, ce qui n’est souvent pas le cas dans les tas d’épierrages traditionnels ; on peut recréer des cavités en ajoutant de grandes buches dans les tas. Ces éléments en apparence improductifs, sont au contraire très rentables si une hermine y niche.

Et les fourrages ? Je conseille une bonne rotation entre prairies et cultures, car le travail du sol, même simplifié, permet de détruire les anciennes galeries, volontiers reprises par de nouveaux campagnols. La rotation favorise également une hausse des rendements de vos prairies. Le piétinement du bétail en pâture aura le même effet destructeur sur les galeries que le travail du sol. Mais une fois le pic installé, il n’y a plus grand-chose à faire, si ce n’est négocier des prix pour l’achat de semences et fourrages en commun ! Ou maintenir des stocks de fourrages sur plusieurs années, ce qui est une autre question...

Quelles sont les mesures que vous préconisez ? J’ai longtemps préconisé la lutte directe en basse densité, mais pour l’instant les gens ne sont pas prêts à le faire, arguant qu’ils n’ont pas le temps. Je reconnais que par le passé, ce travail était fait par les petites mains du village et financé par les Communes. Le modèle est par contre bien appliqué en Franche-Comté où les agriculteurs ont formé des groupes de lutte et cela fonctionne bien. Les agriculteurs travaillent ensemble sur des périodes de 10 ans et réalisent si besoin des luttes chimiques en périodes de basse densité, combinées avec toutes les mesures préventives (voir aussi www.frij.ch/Conseil/Production-vegetale-/Station-phytosanitaire/Herbages ).

Piéger les campagnols : une bonne idée ? Oui ! Le piégeage par les jeunes des villages ayant disparu, les agriculteurs se retrouvent avec de grands domaines et personne pour faire des piégeages. Les communes seraient prêtes à payer, mais l’élan manque pour trouver des jeunes et des taupiers, tout au long de l’année, particulièrement en basse densité. Je propose de donner un prix de 10.- par queue de campagnol, uniquement en période de basse densité. En période de haute-densité, pas la peine de donner plus de 1 cts par queue ! Vu les pertes économiques considérables subies tous les 6 ans, nous avons calculé que chaque agriculteur pourrait investir jusqu’à 80.- par hectare et par an pour payer un taupier.

Propos recueillis par Olivier Boillat, FRI 



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